samedi 28 décembre 2013

Le savoir-écouter : une autre facette de l'enseignement de l'oral

L'enseignement de l'oral ne concerne pas seulement la compétence à s'exprimer adéquatement en public. Il concerne aussi la capacité à écouter divers types de discours oraux. Depuis que je fréquente l'école primaire, jamais un enseignant ne m'a parlé de stratégies d'écoute, soit comment écouter un discours, un film, un reportage, un documentaire pour en extraire les messages livrés par le locuteur ou les informations que l'on cherche à en tirer. Cette compétence est pourtant primordiale, car c'est principalement par l'écoute que l'on s'informe, à la radio ou à la télé. C'est aussi par l'oral que nous sont transmis les divers cours que l'on suit à l'école secondaire, au cégep, à l'université et, depuis quelques années, via les cours à distance. 

Le savoir-écouter est donc d'une importance capitale pour la réussite scolaire et professionnelle et pour pouvoir bien jouer son rôle de citoyen, mais cette compétence est, paradoxalement, très peu, voire pas du tout enseignée. Et lorsqu'elle est abordée en classe, les activités imposées se résument à faire écouter aux élèves un enregistrement sonore, leur demander de prendre des notes (sans leur enseigner comment) et répondre à une série de questions sur le thème dont il était question. Que celui qui a la meilleure mémoire gagne!! 

Autre signe que le savoir-écouter est l'un des enfants pauvres du programme de français, le manque de matériel didactique concret sur le sujet et, conséquemment, l'inconfort des enseignants à l'enseigner (Lafontaine, 2004, p.1). Au terme d'une recherche menée en 2000-2001 en milieu scolaire, Lizanne Lafontaine, professeure rattachée à l'Université du Québec en Outaouais, a élaboré un modèle d'enseignement de l'oral. Elle y présente plus spécifiquement une séquence d'apprentissage consacrée à l'écoute et articulée autour de l'écoute du documentaire L'Erreur boréale de Richard Desjardins.  Nous vous en présentons ici les grandes lignes. Vous trouverez plus bas les références de cette recherche et de la présentation de son modèle. 

Le modèle didactique de la production orale en classe de français langue maternelle au secondaire au Québec de Lafontaine


a. Préciser l'intention de communication, préciser ce que l'élève devra faire : écouter le documentaire pour dégager les enjeux du phénomène de la déforestation au Québec. Pour faire développer par les élèves une attitude positive quant au projet, l'enseignante verra à questionner les élèves pour activer leurs connaissances antérieures sur l'écoute. Elle verra aussi à développer les attentes des élèves vis-à-vis du projet, c'est à dire anticiper le sujet du documentaire, par la lecture d'articles sur le sujet de la déforestation, l'engagement social de Richard Desjardins, l'attention portée au titre, etc. C'est la phase de pré-écoute.

b. Procéder à une écoute globale de certaines scènes choisies du documentaire : 

c. Faire une deuxième écoute, cette fois-ci analytique et portant sur le documentaire complet, afin de dégager et comprendre les différents aspects liés à la déforestation.

d. La situation de communication :
  • intégration des différentes pratiques : l'analyse de textes écrits réalisée en phase de pré-écoute et l'écoute du documentaire devra mener à la rédaction d'une lettre d'opinion sur le thème de la déforestation au Québec;
  • type de sujet présenté aux élèves : ce sujet est non signifiant (il ne part pas du vécu des élèves);
  • prise en compte des intérêts des élèves : l'écoute d'un documentaire est une pratique d'oral public, savoir transférable à diverses situations du quotidien; les élèves pourront travailler en équipe pour la phase de pré-écoute et pour la rédaction post-écoute; les élèves doivent rédiger en prenant en compte leur destinataire (ici, un journal local, le journal étudiant ou le site internet de l'école, le député, le Ministre de l'environnement, etc.);
  • les connaissances antérieures nécessaires à la réalisation du projet : l'enseignante doit s'assurer que les élèves possèdent et maîtrisent, dans une certaine mesure, tous les savoirs permettant de cheminer tout au long du projet et réaliser la production finale attendue. Ici, la structure de la lettre d'opinion et l'énonciation d'arguments ainsi que les ressources de la langue appropriées, soit le lexique se rapportant à la déforestation et ceux pour expliquer un point de vue (modaliser).
Au terme de cette séquence, qui devrait tenir en cinq cours, l'élève aura rédigé sa lettre d'opinion et pourra la faire parvenir au destinataire de son choix. 

Dans mes derniers billets traitant de l'oral, je nous ai donné des stratégies d'enseignement de la prestation d'un discours et de l'écoute d'un discours. Un prochain billet devrait porter sur la prise de notes en contexte d'écoute. Cette activité, qui marie l'oral à l'écriture, est elle aussi d'une importance cruciale pour la réussite scolaire et professionnelle et est, elle aussi, cruellement et tristement absente du programme de français du MELS.


L'entretien d'embauche pour travailler l'oral

D'un côté, nous avons le Programme de formation de l'école québécoise stipule que les situations d'apprentissage proposées aux élèves doivent s'articuler autour de situations de communications réelles. De l'autre, des élèves de 4e et 5e secondaire qui font, en même temps qu'ils fréquentent l'école, leurs premiers pas dans le monde du travail. Si l'on marie ces deux variables, on obtient une idée de séquence d'enseignement-apprentissage qui permet de travailler l'oral et de préparer les adolescents à se présenter devant de futurs employeurs : développer les compétences orales en travaillant l'entretien d'embauche.

À l'époque immémoriale où je fréquentais l'école secondaire, nous avions le cours d'Éducation au choix de carrière (ECC). Une période tous les 9 jours, nous explorions nos goûts et aptitudes professionnels, et apprenions à rédiger notre cv et une lettre de présentation. C'est la base avant de faire le grand pas vers le marché du travail. Aujourd'hui, ce cours a été évacué du curriculum scolaire et remplacé par quelques rencontres avec l'orienteur. Pourtant, le rôle de l'école est de préparer les élèves à prendre part à la vie en société en les rendant aptes, entre autres, à occuper un emploi. Ne serait-ce pas aussi son rôle de leur donner toutes les chances possibles de décrocher cet emploi? 

De toute évidence, il est du rôle de l'école de travailler l'entretien d'embauche et le programme de français langue première permet de le faire. Roxanne Gagnon, de l'Université de Genève en Suisse, suggère ainsi de profiter de la séquence sur l'argumentation, car « l’entretien d’embauche est un échange dans lequel le candidat convoitant un emploi, présente ses ressources de façon à ce qu’elles correspondent aux besoins de l’employeur potentiel et, idéalement, de façon à ce que celui-ci soit convaincu qu’il est le meilleur candidat possible. ( L'entretien d'embauche  :..., p.2) ». 

Du point de vue de la Progression des apprentissages (PDA), l'entretien d'embauche s'insère bien dans la séquence d'enseignement sur l'argumentation, puisque ces deux thèmes recoupent des savoirs à enseigner communs :

  • Tenir compte du contexte de production (PDA, 1.3a);
  • Prendre en compte son destinataire et ses caractéristiques (PDA, 1.2b);
  • Savoir dégager ou  présenter une thèse (PDA, 2.3);
  • Reconnaître ou développer une stratégie argumentative appropriée à la situation (2.4);
  • Expliquer quelque chose avec la nette intention de convaincre ou d'influencer son destinataire PDA, 2.4B)
  • Repérer ou énoncer des arguments (PDA, 2.5);
  • Savoir utiliser des séquences justificatives (PDA, 2.5b ii);
  • Assurer la cohérence de son discours (PDA, 3);
  • Savoir nuancer son jugement; 
  • Etc.

Organiser sa séquence d'enseignement

Ainsi, Gagnon suggère de diviser la séquence d'enseignement en quatre étapes, qui correspondent à quatre grandes capacités. La première, l'anticipation. L'élève doit anticiper les besoins de l'employeur, les questions qui seront posées durant l'entrevue, le déroulement de la situation de communication et faire le bilan de ses expériences personnelles et de ses compétences. En travaillant à partir d'une offre d'emploi, l'élève pourra aussi se documenter sur le poste convoité et l'entreprise elle-même (ses caractéristiques, son fonctionnement, son rayonnement dans sa communauté, etc.).

La deuxième étape permet de développer sa maîtrise de la situation de communication qu'est l'entrevue d'embauche. L'élève doit savoir se présenter, écouter, interpréter les questions et les commentaires de l’intervieweur et réagir de façon à mettre sa candidature en valeur. On travaillera avec les élèves les formules de présentation et de politesse; on s'exercera à faire de brefs récits visant à se présenter, parler de ses motivations à obtenir ce travail, raconter des récits pertinents, comme des exemples de réactions ou de comportements adéquats dans des situations critiques ou délicates; on s'exercera à dégager l'objectif caché de certaines questions de l'intervieweur; on s'exercera à reformuler les questions de l'intervieweur pour s'assurer de bien la saisir et donner la bonne réponse; etc.

La troisième capacité, celle de la textualisation, concerne l'organisation du discours, les stratégies argumentatives et le vocabulaire. On étudie ici ce qu'il est préférable de dire et de ne pas dire; on apprend à répondre à une question de manière appropriée, concise et efficace (introduire, contextualiser, rassembler ses idées, synthétiser et conclure); on étudie deux stratégies argumentatives appropriées pour l'entretien d'embauche, soit la négociation (transformer le négatif en positif) et la concession (concéder pour mieux prouver le contraire); on verra à augmenter son vocabulaire et habiller son discours de manière à l'adapter au contexte, par l'utilisation de termes techniques et de termes visant à modaliser son discours (Modaliser, c'est exprimer sa subjectivité en empreignant ses propos de marques langagières à cet effet [PDA, p.66]).

La quatrième étape capacité concerne la prise de parole : la qualité de la voix, le débit, l'articulation, le débit, la respiration, les pauses, mais aussi la posture du corps, l'habillement, la propreté, etc. On se donnera aussi des moyens de réduire ou contrôler le stress et le trac. On peut le faire en mettant en scène des situations d'apprentissage correspondant le plus possible à une réelle entrevue d'embauche, avec invité surprise et caméra, par exemple, pour faire vivre un certain trac et anticiper des moyens d'y remédier. 

Bien que l'enseignant soit relativement informé sur le milieu du travail, il serait appréciable d'inviter en classe un professionnel de l'orientation, un intervieweur travaillant pour des agences de placement, le responsable de l'embauche dans une industrie importante de votre région, un agent de placement dans un centre local d'emploi, etc. Ces personnes sont les mieux placées pour donner l'heure juste sur le milieu de l'emploi et conseiller les jeunes sur les meilleures stratégies à adopter. 


L'entretien d'embauche : quels savoirs enseigner pour l'oral au secondaire?
Document PDF explicitant la démarche à suivre

vendredi 27 décembre 2013

L'oral à l'école

L'enseignement de l'oral fait partie intégrante du Programme de formation de l'école québécoise. La Progression des apprentissages stipule en effet que le programme de français doit voir à développer trois compétences : Lire et apprécier des textes variés, Écrire des textes variés et Communiquer oralement selon des modalités variées. Si l'on décortique les savoirs a enseigner, on constate que les prescriptions à l'oral sont beaucoup moins nombreuses que celles pour la lecture et l'écriture, et concernent davantage l'écoute que la production de discours à l'oral. Et pour la totalité de ces prescriptions, les compétences attendues concernent la structure du genre étudié ou les diverses ressources de la langue. (Progression des apprentissages, n4-n7-n12-n18,n23-n28-n35-n38). 

Pourtant communiquer oralement, c'est bien plus que transférer à l'oral des mots et des structures de phrases et de textes. Bien au contraire, l'oral appelle une modalité qui lui est propre : le ton, le débit, le volume, la tenue, le regard, la gestuelle, le choix des mots, l'articulation, etc. Voilà autant d'aspects à prendre en compte, à contrôler et ajuster quand on parle en public. Ce sont là autant d'aspects qu'il est possible, nécessaire et agréable d'enseigner. Et cela est d'autant plus important qu'une majorité d'individus sont mal à l'aise et perdent leurs moyens quand vient le temps de s'exprimer publiquement. 

Les situations où l'on doit prendre la parole sont multiples et font partie du quotidien : solliciter un emploi, se présenter à un entretien d'embauche, exprimer un point de vue à son conseil municipal ou poser une question à un professeur ou un supérieur, défendre son point de vue ou sa cause, etc. Pour nombre d'élèves, devoir faire une présentation orale devant la classe représente une source de stress maladif incommensurable. 

Autant qu'écrire et lire, la communication orale est une dimension essentielle de la maîtrise de la langue. Malheureusement, celle-ci est bien souvent négligée en classe de français. Pour preuve le peu de ressources didactiques abordant le sujet sur les différents portails de ressources destinées aux enseignants, et ce, tant en mode production qu'en mode réception. Le chapitre 12, L'Oral, de l'ouvrage Didactique du français langue première de Simard, Dufays, Dolz et Garcia-Debanc (2010) souligne l'importance de la communication orale et propose des pistes didactiques tout aussi intéressantes qu'utiles pour enseigner l'oral et permettre aux élèves de développer cette compétence. 

Ainsi, les auteurs rappellent que l'oral est le premier apprentissage langagier de l'enfant et est indispensable à la vie en société, car c'est par l'oral que l'on peut établir et entretenir des rapports avec autrui. D'où la nécessité de l'enseigner en classe. Les auteurs dénoncent toutefois la passivité paradoxale du milieu scolaire vis-à-vis de l'oral. Cette passivité serait due : 1. à la croyance que l'oral s'apprend « tout seul », naturellement, par la pratique dans les diverses situations de la vie quotidienne et 2. au fait que l'école considère l'oral comme une discipline difficile, voire impossible à enseigner, entre autres, parce qu'il est une forme d'expression de l'identité profonde de l'individu et qu'il est, de ce fait, impossible de l'enseigner. 

Les auteurs insistent toutefois sur la nécessité d'enseigner l'oral, d'abord parce que comprendre des textes est primordial pour pouvoir s'instruire, suivre un cours et réussir leur scolarité. Ensuite, parce que les compétences orales permettent de se distinguer en société et réussir sa carrière. Aussi parce que le langage oral intériorisé contribue au développement de la pensée. Enfin, parce que l'école prévoit l'évaluation des compétences orales, et qu'en omettant d'enseigner l'oral on crée une discrimination des élèves basée sur les pratiques communicationnelles qui ont cours dans leur famille respective. En effet, comme les compétences orales s'apprennent d'abord au sein de la famille et que toutes les familles n'ont pas les mêmes pratiques communicationnelles (comme solliciter l'opinion des enfants au moment de prendre des décisions, ou bien expliquer aux enfants les raisons des décisions prises ou des punitions imposées), tous les élèves ne sont pas égaux devant l'enseignante qui évalue. Comme tout ce qui est évalué doit d'abord être enseigné, nous allons ici nous intéresser aux pratiques didactiques de l'enseignement de l'oral.

Quelques principes d'action

Il convient d'abord de distinguer deux types de situations de communication. L'oral polygéré est une situation de communication impliquant plusieurs interlocuteurs et où chacun doit adapter son discours à celui des autres interlocuteurs (Simard, Dufays, Dolz et Garcia-Debanc, p. 290) On peut penser ici à un débat, un groupe de travail ou une discussion. L'oral monogéré est une situation de communication où un locuteur prend la parole individuellement, de manière longue et suivie. Cet oral préparé est soutenu par une prise de note efficace et est peu interactif. On pense ici à un examen ou un exposé (Idem, p. 290).

Il convient aussi de distinguer les situations où l'oral est mobilisé ou travaillé. Le plus souvent, dans les situations du quotidien ou en classe, l'oral est mobilisé. Il a une fonction plus usuelle, une forme et un ton plus familiers. Par exemple, au quotidien, on va chez son garagiste, on expose le problème à grand renfort d'onomatopées, on demande combien cela va coûter, etc. En classe l'enseignante pose des questions auxquelles les élèves répondent; elle écrit ces réponses au tableau; elle pose de nouvelles questions, etc. Bien que de telles interactions aient ainsi lieu un peu partout et donnent des résultats concluants (réussir à faire réparer son auto, donner la bonne réponse à son enseignante), cela ne correspond pas à de réelles compétences orales. Il convient ainsi de mettre en place, dans la classe, des situations où l'oral sera vraiment travaillé.

Pour travailler l'oral

Ainsi, le travail sur l'oral portera sur différents aspects de son fonctionnement : 

  • s'adapter à son interlocuteur. Pour le faire, on privilégie des activités orales où l'utilisation des gestes est interdite, comme donner des indications routières ou des consignes descriptives pour la réalisation d'un dessin. On développe le vocabulaire du même coup;
  • organiser son discours, le structurer un peu à la manière du texte écrit de référence (débat vs texte argumentatif), pour en assurer l'efficacité et la compréhension. Il faut cependant veiller à ce que les élèves ne récitent pas leur discours par coeur.
  • porter attention au langage non-verbal, comme le regard (Fixe-t-il le fond de la salle ou balaie-t-il l'auditoire?, Est-il fuyant ou traduit-il de la confiance? Etc.) et la posture générale (Est-elle molle? Le locuteur se balance-t-il sur ses hanches sans arrêt? Que fait-il avec ses bras? A-t-il des tics nerveux? Etc.). Filmer les élèves leur permettra de prendre conscience de leur travers. 
  • corriger ses défauts locutoires, c'est à dire tout ce qui se rapporte à la parole : le débit (parler trop vite ou trop lentement), l'intensité (le volume de la voix), l'articulation (Le locuteur parle-t-il avec « une patate chaude » dans la bouche?, Etc. :)), la prononciation (Escamote-t-il les fins de mots? Diphtongue-t-il à qui mieux-mieux?, Etc.) et l'intonation (La voix est-elle drabe, morne, ou au contraire appuie-t-elle trop sur les mots et tous les mots?, Etc.).
  • savoir s'aider de notes écrites efficaces, assez précises pour aider à la fluidité du discours et assez concises pour que le discours paraisse improvisé.
  • Du point de vue syntaxique, l'enseignante fera remarquer la présence à l'oral de phrases inachevée, due au fait que le locuteur produit et livre son discours simultanément et en direct. Le locuteur est plus susceptible de se tromper, se reprendre, changer ses manières de dire, etc.
  • Du point de vue lexical, l'enseignante fera remarquer les différences lexicales et grammaticales entre l'oral et l'écrit. Par exemple, du point de vue lexical, la langue orale est plus « active », utilise davantage les verbes, alors que l'écrit est plus conceptuel, utilise davantage les noms. Par exemple, à l'oral on « va rencontrer quelqu'un », alors qu'à l'écrit, on « va à sa rencontre ». Du point de vue grammatical, l'oral appelle un style plus sobre, plus direct, alors que l'écrit permet plus d'effets de style. 

Peu importe l'aspect travaillé, l'enseignante verra à expliquer les différents critères et en donner des exemples. Elle pourra également filmer les élèves dans différentes situations afin de faire leur faire prendre conscience des aspects à travailler pour chacun, en prenant bien soin de ne pas ridiculiser les élèves. Cette évaluation se veut constructive. Une fois tous les critères explicités et compris par les élèves, il sera possible d'avoir un véritable apprentissage et une véritable évaluation de l'oral.


Enfin, pour développer l'oral, les auteurs soutiennent l'intérêt d'activités ritualisées, qui prendront place à chaque cours ou à intervalles réguliers durant l'année et les objets d'études. Elles pourront prendre la forme de revue de presse, de présentation de livre, de lecture à voix haute ou de déclamation par-coeur d'un texte de poésie, de critiques de textes et même d'études lexicographiques à la manière de La Capsule linguistique de Guy Bertrand sur les  ondes de la radio de Radio-Canada, etc. 

Et vous, quelles-sont vos stratégies d'enseignement de l'oral??



Pour lire le texte complet ou pour un complément d'information : 
Simard, C. Dufays ,J.-L., Dolz, J. et Garcia-Debanc, C. (2010) La lecture. Dans Didactique du français langue première, (236-260), Bruxelle, Belgique, De Boeck.

La communication orale en voie d'extinction??

À une époque pas si lointaine, les communications interpersonnelles en mode oral étaient monnaie courante : on se rendait visite ou on se téléphonait; on allait chez le commerçant ou on lui téléphonait pour avoir des informations sur ses produits; on se réunissait en famille et on multipliait les détours pour rencontrer des gens, etc. L'arrivée d'internet et des médias sociaux a cependant littéralement transformé les moyens de communication et modifié les les relations interpersonnelles : les courriels, les forums de discussion, les textos et Facebook, pour ne nommer que ceux-là, font désormais partie intégrante de notre vie et ont modifié nos pratiques communicationnelles à jamais. Pour le meilleur et pour le pire.

Certes, ces outils de communication font partie de la nouvelle culture et ils comportent de nombreux avantages : démocratisation de l'information, ouverture virtuelle sur le monde, facilitation d'opérations bancaires et commerciales, établissement de communautés virtuelles d'amis et de contacts, etc. Mais en même temps, il me semble qu'ils ont contribué à faire régresser les compétences à communiquer. 

On peut ainsi se demander si ces nouveaux modes de communication écrite ne sont pas en train de tuer la capacité et l'habileté à communiquer oralement, et ce, surtout auprès des nouvelles générations. Sans vouloir généraliser, on ne peut nier le fait que les jeunes d'aujourd'hui sont plus portés à s'envoyer des textos ou se parler via Facebook au détriment de la communication directe. Je parle en connaissance de cause. 

Ma fille aînée et son « Dieu-Grec» s'envoient des textos à longueur de journée. Jamais je ne les ai entendus parler ensemble au téléphone. J'ai beau m'évertuer à lui expliquer qu'on ne peut développer une relation affective avec une autre personne et apprendre à se connaître par texto, qu'il faut pour cela échanger réellement, se parler, discuter, se regarder, se sourire, se toucher, etc., elle ne comprend pas. Elle me répond qu'ils vont se voir durant le week-end. Mais moi je sais bien que, le week-end venu, leurs bouches serviront à échanger des fluides bien plus que des mots...

Autre phénomène observé : la panique et le sentiment d'être démuni à l'idée de devoir téléphoner quelque part pour demander un renseignement. Vous doutez? Si je demande à mes filles de trouver un renseignement quelconque, elles se tournent d'abord vers Google. Et quand l'information recherchée s'avère incomplète ou introuvable et que je leur suggère de téléphoner directement, c'est la cata. J'exagère à peine. « Non, finalement, pas besoin... Ben là, j'y dis quoi??? Je lui dis ça comment? J'ai une idée, je vais le demander à mon amie sur Facebook! » Et c'est sans compter tous ceux et celles qui se draguent et se laissent par texto, qui règlent leurs différends sur Facebook ou qui se créent une personnalité virtuelle qui n'a rien à voir avec qui ils sont vraiment.

Si c'est en forgeant qu'on devient forgeron, c'est en parlant qu'on devient de meilleurs communicateurs. Et cela est d'autant plus nécessaire que certaines activités humaines ne peuvent avoir cours en format électronique : gérer des employés ou entretenir une relation d'aide (ce que font les psychologues, travailleurs sociaux, les répondants à des lignes téléphoniques d'urgence ou d'aide, etc.), défendre des droits (avocats, juges, etc.), ou travailler comme médecin, infirmière, policier, etc., demandent des capacités relationnelles importantes. 

C'est pourquoi je répète à mes filles que les personnes qui auront cultivé leurs aptitudes à communiquer oralement auront une longueur d'avance sur tous les autres. Que celles-ci seront riche d'une vertu qui se perd à la vitesse de la fibre optique. 

J'espère que le message fait son chemin. Peut-être devrais-je le leur texter...


mercredi 18 décembre 2013

La démarche active de découverte pour l'enseignement de la grammaire

La démarche active de découverte (DADD) est la nouvelle tendance en ce qui a trait à l'enseignement de la grammaire. L'objectif premier de cette méthode est de faire comprendre aux élèves les grandes régularités du fonctionnement de la langue et fait appel à leur capacité d'observation, d'expérimentation, de raisonnement et d'argumentation. Se déroulant en six étapes, elle permet aux élèves de construire progressivement et d'ancrer plus solidement leurs connaissances de la langue. Nous résumons plus bas un article de Suzanne-G. Chartrand, didacticienne et chercheuse phare sur le sujet. 

1ère étape : la mise en situation

Pour se lancer volontairement dans l’étude d’un phénomène de langue, l’élève doit en comprendre le sens et la pertinence. La mise en situation sera l’occasion de faire prendre conscience à l’élève de la nécessité de l’étudier. Pour ce faire, l’enseignante fait un rappel des notions enseignées plus tôt, au cours des mois précédents ou même celles vues depuis le début du primaire. Elle active ainsi les connaissances antérieures des élèves peut faire quelques mises au point pour s’assurer que tous ont les bonnes bases pour entreprendre la séquence d’enseignement. Par la suite, elle démontrera la fréquence d’occurrence des erreurs, dues à la mauvaise compréhension du phénomène à étudier, en puisant des exemples des textes des élèves. Elle peut également démontrer comment la maîtrisant du phénomène en question réduira considérablement tel type d’erreurs dans les productions écrites. La mise en situation se clôt en fixant un objectif d’apprentissage précis, ici, la reconnaissance du GN et de ses composantes.

Dès le départ, l'enseignante insistera sur la nécessité d'utiliser des termes précis pour nommes les faits de langue. L'adoption d'un métalangage commun à toute la classe permettra de réduire les ambiguïtés. 

1ère étape – Observation du phénomène
À partir d’un corpus regroupant divers exemples du phénomène à étudier, les élèves sont amenés à en observer les multiples manifestations. Regroupés en petites équipes de travail, les élèves devront ensuite effectuer des tâches de travail : regrouper les éléments semblables (DÉT. + NOM, DÉT + NOM + ADJ, DÉT + NOM + GP, etc.), les classer en précisant selon quels critères ils le font, repérer et lister des éléments semblables dans le corpus, etc. Le corpus utilisé peut contenir des éléments tirés de textes d’élèves ou de textes courants ou littéraires.
Pendant cette tâche, les élèves notent leurs observations ainsi que les questions auxquelles ils n’ont pas trouvé réponse durant leurs observations. La plénière qui suit cet exercice est le moment pour les élèves de faire part à la classe de leurs observations et des questions qui subsistent.

2e étape – Manipulation des énoncés et formulation d’hypothèses

La manipulation du phénomène à l’étude permet de lui faire subir des transformations et de ce fait en découvrir les caractéristiques et propriétés. On propose généralement 4 opérations, soit ajouter, soustraire ( ou effacer), remplacer et déplacer. Dans le cadre de cette démarche portant sur le GN, l’enseignante proposera les suivantes : 

  • la soustraction ou effacement d’un élément du GN : effacer tous les éléments du GN qui peuvent l’être et dégager les éléments essentiels du GN;
  • le déplacement : déplacer le GN dans la phrase pour déterminer sa place dans la phrase;
  • le remplacement : remplacer un GN par un pronom.



La discussion qui suivra cet exercice permettra de mettre en commun les constatations des élèves, faire le point et émettre des hypothèses concernant le GN.



Étape 3 – Vérification des hypthèses

Cette étape consiste à valider les hypothèses émises en les appliquant à un nouveau corpus.


Étape 4 – Formulation de règles et établissement de procédures

Une fois les hypothèses vérifiées et confirmées, les élèves travailleront en équipes à formuler dans leurs mots des lois, des régularités ou des règles. Ils pourront ensuite comparer le résultat de leur travail avec le reste de la classe et ainsi en peaufiner la formulation. Cette étape se conclut en demandant aux élèves de comparer les règles qu’ils ont formulées avec celles contenues dans les grammaires et autres ouvrages de référence.


Étape 5 – Exercisation

Ici, les élèves appliquent les règles qu’ils ont formulées. L’enseignante doit alors s’assurer de proposer des cas simples, mais aussi des cas plus compliqués, qui demanderont plus de réflexion. Ces exercices seront de types variés : reconnaître et repérer le phénomène dans un corpus, mais aussi justifier ses choix; construire des phrases contenant diverses manifestations du phénomène; produire des textes en y faisant apparaître le phénomène étudié, etc.


Étape 6 – Réinvestissement contrôlé


Cette étape, que l’on pourrait aussi appeler la pratique autonome, s’étale dans le temps. Maintenant qu’il a acquis une certaine maîtrise de la notion, il doit le démontrer dans ses futures productions. L’enseignante incitera les élèves à porter attention à l’application de la règle et en tiendra compte lors des évaluations formatives et sommatives.

Toute la démarche explicitée plus haut comporte des obstacles de taille. D'abord, elle repose entre autres sur l'intuition des élèves, leur curiosité, leur capacité de généraliser, etc., ce qui sera ardu ou même non naturel pour certains d'entre eux. L'enseignante verra donc à guider et orienter leur travail pour leur permettre de cheminer adéquatement. Ensuite, la DADD est chronophage : elle demande temps et patience, et ce, tant de la part de l'enseignante que de la part des élèves.  Elle demande enfin de la part de l'enseignante un important travail de préparation et des connaissances et compétences grammaticales étendues. Ainsi, l'enseignante devra faire voir le caractère « payant » à long terme de cette méthode, qui, quoique exigeante, permet d'engendrer des apprentissages plus solidement ancrés.

Pour lire le texte complet, suivez le lien : 


Fermer la porte à l'ennemi

Avez-vous des ennemis? Ou du moins des gens envers qui vous avez une animosité certaine? Probablement. Nous en avons tous. Comment agissez-vous avec ces personnes? Les invitez-vous chez vous? Leur ouvrez-vous grand votre demeure? Leur servez-vous leurs mets préférés? Faites-vous en sorte qu'ils se sentent bien chez vous et qu'ils s'y sentent si bien qu'ils aient le goût de revenir? Ou pire encore, qu'ils décident d'élire domicile chez vous? Évidemment que non, me direz-vous. 

Le cancer et l'ennemi juré par excellence. Il fait des ravages terribles : il attaque le corps sans pitié, se rit des traitements qu'on lui oppose, et lorsque ces traitements arrivent à l'anéantir, il revient parfois à la charge par une autre porte d'entrée. S'il prend vie dans notre corps, se développe et vient à prendre toute la place, jusqu'à nous évincer de notre propre corps, c'est qu'il s'y sent bien. C'est qu'il a tout ce dont il a besoin pour « s'épanouir » et vivre « en santé ». Et s'il trouve tout ce dont il a besoin, c'est que nous le lui avons nous-même livré sur un plateau d'argent. Par notre alimentation et notre mode de vie. 

De quoi raffole le cancer? Du sucre, du sel, du lait et de la viande rouge, aliments qui nourrissent directement les cellules cancéreuses ou qui maintiennent l'acidité du corps, favorable au développement du cancer. Préférer un régime alimentaire à base de légumes frais et de végétaux (céréales, graines, noix, amandes et peu de fruits), boire de l'eau purifiée ou filtrée et du thé vert au lieu du sacro-saint café, éviter le chocolat (noooooooooon!) et choisir de bons suppléments alimentaires, se détendre et couper les sources de stress (je vais définitivement continuer d'aller au spa) et faire du sport pour garder son corps bien oxygéné sont des pistes de solutions préventives. 

En lisant cela, on constate que notre mode de vie est « cancérophile ». Mais nous devons le modifier, au nom de notre santé. Un geste à la fois, pour s'assurer que jamais l'envie lui prenne de venir frapper à notre porte. 

L'article qui suit détaille les informations que je viens de vous livrer. Vous pouvez aussi lire les livres du bon docteur Béliveau. Bonne lecture et bonne santé!


mardi 17 décembre 2013

Savez-vous écrire?

« Bien sûr que je sais écrire. Regarde : J-E, espace, S-A-I-S, espace, É-C-R-I-R-E, point. Même pas de fautes! » Bravo! Vous avex réussi à agencer des lettres pour former des mots, ces mots, agencés ensemble, forment une phrase sensée et compréhensible, et vous avez respecté les codes orthographiques et grammaticaux. Fantastique!! Mais savoir écrire implique tellement plus que l'agencement de graphèmes et de mots. Y interviennent également des aspects socioculturels, psychologiques et, évidemment, langagiers. 

Écrire : une activité complexe

Dans une perspective socioculturelle, les pratiques d'écriture varient selon le contexte où ils sont produits. Ainsi, les divers écrits doivent être adaptés au contexte de diffusion et l'auditoire visé, par exemple. On ne rédige pas un article publié dans un quotidien grand public de la même manière qu'un article publié dans une revue spécialisée distribuée à des initiés. Il faut savoir adapter son ton et son vocabulaire. Et un écrit pamphlétaire  suscitera des réactions plus ou moins vives, selon le climat social où il est produit et reçu. 

Dans une perspective psychologique, le geste d'écriture mobilise diverses facettes chez celui qui écrit : sont mis à contribution simultanément sa pensée, son affect, son corps et ses représentations et opinions sur les thèmes dont il traite. Prenons l'exemple d'un texte argumentatif. Au moment de le rédiger, le scripteur s'investit émotivement, car il y exprime ses opinions, ses perceptions et ses représentations des thèmes abordés. Cela implique qu'il y a déjà réfléchi, mais parfois cette réflexion s'opère durant la rédaction. Au même moment, les fonctions cognitives du scripteur entrent en jeu : il doit s'assurer de comprendre la tâche à réaliser, sélectionner ses idées ou les informations à intégrer au texte, les placer en ordre d'importance selon le texte à produire, établir des liens entre elles, garder tous ses éléments en mémoire de travail et les exploiter adéquatement et au bon moment. 

En même temps, le système sensorimoteur est mis à contribution pour former des lettres lisibles et harmonieuses, faire avancer la main, respecter les lignes tracées sur la page, ajuster sa posture, coordonner l'oeil et la main, etc. 

Et enfin, le scripteur doit utiliser les composantes langagières adéquatement : orthographe, syntaxe, lexique, mais aussi les règles d'énonciation, de connexions et d'agencement des idées et de division en phrases et en paragraphes, etc., sans oublier les particularités qu'appellent les différents genres de texte. Une nouvelle littéraire doit respecter une structure et des conventions différentes de celles d'un roman, d'un conte ou d'un message publicitaire. 

Des pistes pour l'enseignement de l'écriture

Nous venons de le voir, l'acte d'écrire est extrêmement complexe. Ainsi, en classe, certains éléments feront l'objet de situations d'enseignement-apprentissage, alors que d'autres seront pris en compte au moment de faire écrire les élèves ou d'évaluer leurs productions. Mais par où commencer?

Simard, Dufays, Dolz et Garcia-Debanc (2010) suggèrent que chaque séquence d'apprentissage s'articule nécessairement autour d'une situation de communication réelle (participer à un concours de rédaction d'un conte, répondre à un courrier du lecteur, etc.) et s'amorce par une production écrite diagnostique. L'analyse de ces textes permettra de constater et d'inventorier les erreurs des élèves quant au fonctionnement de la langue (orthographe, grammaire, etc.), à la structure du genre de texte à l'étude et à la fluidité des idées. Les difficultés ainsi repérées détermineront les aspects du genre littéraire à étudier et les diverses activités d'apprentissage à mettre en place et l'ordre dans lequel le faire. Dans certains cas, les erreurs repérées dans les textes de certains élèves seront le symptôme de difficultés plus profondes et nécessiteront des interventions spécialisées, en orthopédagogie par exemple. La production finale sera le moment pour l'élève de mobiliser l'ensemble de ses nouvelles connaissances et l'évaluation de l'enseignant portera sur les éléments pointés et enseignés durant la séquence. 

L'intense mobilisation de diverses composantes du scripteur appelle aussi des interventions particulières. C'est que de telles situations entraînent, surtout pour des scripteurs novices, une surcharge cognitive, un trop-plein d'informations et de paramètres dont il doit tenir compte, qui sont la cause de nombreuses erreurs dans les productions écrites. Ainsi, Simard, Dufays, Dolz et Garcia-Debanc (2010, p. 265) proposent le modèle de Hayes et Flower, qui proposent une façon de faire permettant de palier ce type d'erreurs : faire un plan, travailler la mise en texte et donner du temps de révision. 

Enseigner l'écriture

En guise de conclusion, nous énumérerons quelques principes qui devraient, toujours selon Simard, Dufays, Dolz et Garcia-Debanc (2010, p. 273), guider les pratiques didactiques pour l'enseignement de l'écriture : 

  • 1. positionner la langue comme outil de communication;
  • 2. démontrer la variabilité de la langue et la nécessité de l'adapter aux divers modes, genres et contextes de discours écrits;
  • 3. proposer des textes comme premier objet d'étude de la langue;
  • 4. situer l'apprentissage dans des projets de communication réels;
  • 5. exploiter les liens et les interactions entre les différentes habiletés (orale, écrites et lecture);
  • 6. offrir des outils permettant à l'élève de s'améliorer et suivre l'avancement de ses progrès
  • 7. souligner le caractère évolutif d'une production écrite et insister sur la nécessité de retravailler ses textes, par la relecture, la révision et la réécriture, et accorder du temps pour le faire. 


Pour lire le texte complet : Simard, C., Dufays, J.-L., Dolz, J. et Garcia-Debanc, C. (2010). La lecture, dans Didactique du français langue première, (223-260), Bruxelle, De Boeck.


Le journal explicatif de lecture

Dans mon dernier billet, j'ai fait mention d'une activité didactique de lecture : le dévoilement progressif. Dans la même veine, le journal explicatif de lecture est une autre activité à faire vivre aux élèves dans le cadre d'une séquence d'enseignement sur la lecture. Destinée à faire expérimenter une stratégie de lecture globale, le journal de lecture confère à la compréhension de lecture ses lettres de noblesse. 

Je me suis moi-même prêtée à cette activité pour un travail à produire dans le cadre de mon cours de didactique du français. La définition que j'en fais est que c'est une activité d'expérimentation de la stratégie de lecture du discours narratif où le lecteur est appelé à rendre explicite son comportement de lecteur, ce qui lui permet de développer une meilleure compréhension du récit et de porter un regard critique sur l'oeuvre elle-même. 

Qu'est-ce que ça veut dire, concrètement? Pendant qu'il lit un texte de type narratif, disons un roman ou une nouvelle littéraire, le lecteur doit noter, dans un journal de lecture ou un journal de bord,  ses réactions vis-à-vis du texte qu'il est en train de lire (réactions, sentiments ressentis, questionnements en lien avec le récit, liens avec son propre vécu, ses raisonnements, ses pertes de compréhension, les mots inconnus, etc.). Toutes les entrées notées dans le journal doivent se rattacher à un passage précis du texte. 

Des exemples de réflexions et d'entrées? Je me demande pourquoi tel personnage agit ainsi. Telle situation me fait penser à quelque chose que j'ai déjà vécu. Je trouve tel événement triste, drôle, étrange, triste parce que... Ah! Tiens, je comprends maintenant pourquoi tel personnage a agit ainsi, c'est parce que... Je suis ou je ne suis pas d'accord avec tel agissement ou telle parole de tel personnage parce que... Je ne comprends plus ce que je lis, alors je vais revenir à la page précédente et relire. Etc. 

J'ai expérimenté le journal de lecture dans le cadre de mon cours de Didactique du français I (UQTR, DID6009). J'ai été surprise d'en constater plusieurs effets formateurs. Mes questionnements durant ma lecture m'ont amenée à réfléchir au récit, approfondir ma compréhension des événements et des personnages. J'ai été plus à même de dégager les valeurs et le messages qu'a voulu transmettre l'auteur (ou du moins ceux que je crois qu'il a voulu transmettre). Et mes questions restées sans réponses au terme de ma lecture m'ont incitée à faire des recherches pour y trouver la réponse. Personnellement, j'ai donc trouvé mon expérience de lecture plus riche et plus satisfaisante que toutes celles où je ne fais que lire passivement et attendre la suite. 

Colette Buguet-Melançon, professeur au Collège Édouard-Monpetit, a fait les mêmes constatations, découlant d'une expérience de lecture du texte littéraire au moyen du journal de lecture, auprès d'étudiants de niveau collégial. 


« Outil de travail, le journal permet de guider l'élève dans le passage de la lecture affective à la lecture analytique et méthodique, voire à la lecture créatrice qui constitue le troisième niveau. En rendant compte de sa lecture sous une forme libre, l'élève développe des habiletés fondamentales dans le cours de français; souvent pêle-mêle, il : dégage des informations, des sentiments, des idées, des valeurs; réagit en questionnant, en approfondissant, en rejetant ou en confirmant ses valeurs; développe sa curiosité (appel au dialogue avec le professeur, demandes de suggestions de lecture). »

Les différentes réactions du lecteur l'amène à se positionner face au texte qu'il lit. En précisant ce qu'il ressent, en réfléchissant à pourquoi il réagit ainsi, il prend d'abord conscience de sa propre personnalité, de ses valeurs et de qui il est en tant qu'individu. Il construit aussi sa compréhension du texte qu'il lit. En comparant ses perceptions avec celles de ses collègues de classe, lors d'échanges en cercles de lecture, par exemple, il confronte ses idées, ses valeurs, ses perceptions avec celles de ses pairs, les met à l'épreuve, les infirme ou les confirme et, ainsi, aiguise son sens critique général, mais aussi sa capacité à évaluer une oeuvre littéraire. 

Cette façon de faire va bien au-delà des compréhension de textes que je me souviens avoir fait au primaire et au secondaire. (Dans mes souvenirs, ces exercices dépassaient rarement, voire jamais, le premier degré de compréhension. Au mieux, ils comportaient quelques questions d'inférence.) Ici, la compréhension de texte prend vraiment tous son sens!


Pour en savoir plus : 

Buguet-Melançon, C. (1997) Pour une lecture authentique au collégial : le journal de lecture, Correspondance, 3 (2), récupéré du site http://correspo.ccdmd.qc.ca/Corr3-2/Journal.html

Simard, C., Dufays, J.-L., Dolz, J. et Garcia-Debanc, C. (2010). La lecture, dans Didactique du français langue première, (223-260), Bruxelle, De Boeck.

Le spa : bonbon pour la santé!



Moi et mon Chéridamour avons toujours hâte que dimanche soir arrive. C'est que pour nous deux, dimanche soir rime avec sortie au spa. Nous avons découvert les joies du spa il y a près de 10 ans, mais depuis trois ans, nous avons littéralement intégré cette activité à notre mode de vie. 

Tous les dimanches soir ou presque, été comme hiver, nous abandonnons nos trois filles (Combien vous gagez qu'elles aussi sont contentes d'avoir leur dimanches soir???) et empruntons le pittoresque chemin des Pères pour nous rendre à Bolton. La route étroite et sinueuse qui surplombe le lac Memphrémagog nous réserve à l'occasion quelques surprises : chevreuil, dindes sauvages, il faut garder l'oeil ouvert et le pied léger... Bien souvent, nous nous arrêtons au dépanneur de Austin pour acheter quelques pointes de fromages de l'Abbaye St-Benoit-du-Lac, fabriqué avec amour, dévotion et savoir-faire, à quelques kilomètres de là. Avec ses 44 moines bénédictins, St-Benoît-du-Lac est la 2e plus petite municipalité du Québec??

Tout au bout de ce chemin de Pères, il y a le tout riquiqui village de Bolton et son merveilleux spa. Bonheur, plaisir, détente, rencontres et... tellement de bienfaits!!

Les bienfaits du spa nordique sur la santé sont tout aussi nombreux que confirmés. Faire transpirer son corps et l'immerger ensuite dans l'eau glacée stimule en effet le système immunitaires, améliore la circulation sanguine et aide le corps à se purger de ses impuretés. Des recherches menées en Finlande auraient aussi démontré la contribution des traitements à la vapeur pour traiter et même guérir des problèmes tels que l'acné et l'arthrite, justement parce qu'elle augmente la circulation sanguine. Sans compter qu'elle favorise la détente des muscles et de l'esprit, améliore le sommeil et l'apparence de la peau, et bien plus encore. 

Ça me fait penser... Dans le cadre du cours de changement en éducation (UQTR, PDG6012 - Système scolaire et changements en éducation), j'ai fait une recherche sur l'impact des concentrations sportives dans le milieu scolaire québécois. J'y ai entre autres appris que la pratique du sport améliorerait les fonctions cognitives. Une étude citée par Trudeau et Shephard (2009) menée auprès d’enfants de 11-12 ans démontre une amélioration de la mémoire après la pratique d’un sport d’équipe. Cela serait dû à une meilleure irrigation sanguine du cerveau, survenant après une période d’activité physique, ce qui favorise la croissance de nouveaux vaisseaux sanguins dans des zones du cerveau responsables de l’apprentissage et de la mémoire (Santos et al, 2003, cités par Janosz et al, 2013). 

Tiens, tiens. Et si mes visites au spa étaient aussi profitables à mon cerveau qu'au reste de mon corps... La pratique du spa n'est pas la panacée, mais y'a une piste, là! Parlez-moi d'une activité qui joint le très utile au très agréable!!!

Alors à quand votre prochaine visite au spa???



dimanche 15 décembre 2013

Comment enseigner la lecture?

Je poursuis ici la réflexion amorcée lors du billet précédent et qui concerne l'enseignement de la lecture. Cette réflexion prend la forme du résumé d'un chapitre du livre Didactique du français langue première de Simard, Dufays, Dolz et Garcia-Debanc. Nous avons ainsi conclu que l'acte de lire est complexe, qu'il fait intervenir divers acteurs, dont le lecteur et le texte. Aujourd'hui, nous nous demandons quels sont obstacles à l'enseignement de la lecture et comment il est possible d'enseigner cette facette de la langue efficacement.

Pourquoi apprend-on à lire? 
La question semble anodine, mais pour une future enseignante de français, elle est essentielle, car les réponses dicteront ses choix didactiques. Nous lisons à tous les jours et dans toutes les sphères d'activité de notre vie : que ce soit au travail, pendant nos loisirs ou dans le cadre scolaire ou au quotidien, la nécessité de décoder et comprendre des textes est omniprésente. Elle revêt ici une utilité technique, essentielle pour le fonctionnement des individus en société. 


Mais l'importance de savoir lire va au-delà de cela. L'enseignement de la lecture devrait permettre à l'élève d'accroître sa connaissance générale des oeuvres culturelles, ce qui lui permettra de les comparer entre elles, de les apprécier et pouvoir participer à une communauté culturelle. La lecture devrait aussi rendre les élèves capables de réfléchir, mieux penser et comprendre diverses notions abstraites. Enfin, la lecture doit être vue comme une activité émotive, exutoire ou d'épanouissement, car elle offre des possibilités de rencontres ou d'aventure que l'on ne vit pas dans notre quotidien. Des finalités technique, culturelle, réflexives et psychoaffectives : le spectre est large et l'enseignement de la lecture devrait viser à développer chacune d'entre elles. 

Des obstacles et des pistes d'action
Bien que rempli de bonnes intentions, l'enseignant de français se heurtera à divers obstacles : 1. tous les élèves n'aiment pas lire et le font seulement dans le cadre scolaire et 2. de façon générale, les compétences en lectures des élèves sont insuffisantes (un manque de connaissances - sur la langue et les genres de textes - et des stratégies de lectures insuffisantes ou mésadaptées). Étonnamment, ces déficiences des élèves découlent de la déficience de l'enseignement de la lecture à l'école, d'où la nécessité de changer les pratiques didactiques, c'est-à-dire qui concernent spécifiquement l'enseignement du français langue première. 

À cet effet, l'ouvrage de Simard, Dufays, Dolz et Garcia-Debanc offre plusieurs pistes d'intervention. Les moyens proposés concernent les premiers apprentissages, certes, mais seront encore tout à fait à propos dans certaines classes de niveau secondaire. D'abord, la langue ne doit plus être vue comme un simple moyen de communication servant à produire des textes oraux ou écrits, mais aussi comme un objet d'étude. Cette activité d'analyse, de déconstruction de la langue en ses parties (classes grammaticales) et d'observation de la relation phonème-graphème (quand j'entends le son « o », je vois les lettres « o, au, eau ») prendra place en cours de grammaire. Ensuite, il importe de faire remarquer les différences entre la langue écrite et la langue orale (par des ateliers de transformation de formulations écrites vers l'oral et vice versa). Enfin, enseigner des stratégies de reconnaissance des mots écrits

Et ensuite?
L'enseignant doit utiliser les démarches plus fondamentales décrites plus haut en alternance avec des démarches complémentaires. Ces démarches : 1. favoriseront les interrelations entre texte, lecteur et contexte (ex. : activités de réflexion sur les émotions et réactions éprouvées durant la lecture); 2. feront le lien entre le texte lu et les connaissances antérieures du lecteur (ex. : lettre à l'auteur qui a changé ma vie); 3. susciteront la motivation au coeur de l'acte de lecture et 4. permettront de concevoir la lecture comme une résolution de problèmes et comme une activité sociale. 

Les auteurs proposent 10 de ces démarches, assorties d'activités concrètes à réaliser en classe.  L'une de ces démarches propose de « travailler le processus de lecture lui-même (...) en rendant l'élève plus conscient des processus de la lecture comme construction de sens (p. 243). » Pour ce faire, les auteurs suggèrent entre autres l'activité du dévoilement progressif (p. 244). Je prends le temps de m'y intéresser particulièrement, car elle constitue en fait une stratégie de lecture et que le programme du MELS insiste sur  l'enseignement de stratégies pour la lecture, mais aussi pour l'écriture.

« (Cette activité) consiste à découper la lecture d'un texte narratif bref en 4 ou 5 parties successives en effectuant pour chaque partie un arrêt sur image, qui amène les élèves à s'interroger collectivement sur le sens et les valeurs du texte qu'ils sont en train de lire. (...) Initier les élèves à une telle démarche revient à les rendre conscients qu'en lisant, ils effectuent des hypothèses, recourent à certains types de codes et ont la possibilité, ce faisant, de privilégier différents modes de lecture. (...) Concrètement, il s'agit donc ici de stimuler l'élève à se poser des questions, à mettre lui-même les textes qu'il découvre en relation avec ses connaissances antérieures et à faire en sorte que les relations ainsi posées lui donnent accès à un certain degré d'abstraction. (Ainsi), les élèves auront appris à améliorer réellement leur compétences de compréhension, d'interprétation et d'évaluation des textes narratifs. (p. 244) ».


Le dévoilement progressif, réalisé tel que décrit, permet de réellement comprendre un texte lu. Il sera ensuite possible de réinvestir la compréhension du texte par les élèves dans diverses activités qui leur permettront de démontrer leur compréhension ou de transférer leurs nouvelles connaissances à la production de textes écrits ou oraux.


Pour lire le texte complet ou pour un complément d'information : 
Simard, C. Dufays ,J.-L., Dolz, J. et Garcia-Debanc, C. (2010) La lecture. Dans Didactique du français langue première, (236-260), Bruxelle, Belgique, De Boeck.

samedi 14 décembre 2013

Savez-vous lire?


« Bien sûr que je sais lire », me répondrez-vous. « C'est facile, regarde : Il était une fois un jeune et beau prince, malheureusement pas très futé. Un jour, ... » Tu vois bien que je sais lire. » 

L'acte de lire est cependant plus complexe que cela. C'est un geste qui désigne certes le décodage de mots et de phrases, mais également le décodage de différents genres littéraires pour en extraire le sens ou l'essence. Lire est une activité qui met en interaction trois acteurs indissociables. Et surtout, lire est une constante opération de construction de sens. 

Paru en 2010, le livre Didactique du français langue première de Simard, Dufays, Dolz et Garcia-Debanc explicite la complexité de l'acte de lire. Le texte qui suit résume les propos de ces auteurs sur le sujet. 

Lire : un acte individuel et social

Lire est d'abord un acte personnel. Chacun lit pour atteindre un but différent : apprendre, s'informer, se détendre, faire un travail scolaire, réfléchir sur des thèmes et des questions qui l'interpellent, etc. Ensuite, chacun construit le sens d'un texte lu (roman, article de journal, revue scientifique, etc.) à partir de ce qu'il est : son bagage d'expériences de vie et de connaissances sur le monde. 

Évidemment, l'individu se définit aussi à partir de la société et de la culture où il évolue. Dans cette perspective, le texte devient alors un objet socioculturel, qui sera reçu, analysé, interprété par divers lecteurs à partir de valeurs et codes partagés par les membres de cette même société, ce qu'on appelle le sens commun. Ainsi, un lecteur construit le sens d'un texte à partir de facteurs qui lui sont propres en tant qu'être unique, mais également à partir de facteurs communs à toute une société.

Les variables de la lecture

Jocelyne Giasson, chercheuse québécoise phare dans le domaine de la lecture s'intéresse principalement aux différentes interventions en lecture et aux lecteurs en difficulté. Selon elle, trois variables interviennent dans l'acte de lire. Il y a d'abord LE LECTEUR, qui reçoit un texte avec tout ce qu'il est : ses connaissances sur le monde et sur le langage, mais aussi ses expériences de vie, qui vont teinter sa lecture de réactions, d'émotions et de réflexions en lien avec ses expériences. Ainsi, lire et comprendre ce qu'on lit sont, en partie, des actes émotifs. La compétence du lecteur, qui se traduit par la mise en oeuvre de divers  micro, macro et métaprocessus, teintera également sa relation au texte qu'il lit. 

Entre aussi en jeu LE TEXTE lui-même, soit sa forme (article de journal, texte argumentatif, article scientifique ou documentaire, roman, etc.), son contenu (idées, thèmes, aventures, information, etc.) et l'intention de l'auteur (faire rire, convaincre, décrire, informer, etc.) 

Enfin, LE CONTEXTE, qui est tant psychologique (son intention de lecteur, c'est à dire pourquoi il lit, et sa motivation ou son intérêt à lire), social (les valeurs commune aux membres d'une même société ou culture d'attache) que physique (le bruit ambiant ou la taille du texte peuvent être des obstacles à la lecture).

Les processus de construction du sens
Construire le sens d'un texte est aussi un processus complexe, qui mobilise quatre types d'opérations qui s'effectuent simultanément : l'orientation préalable, les modes de lecture, les phases de la construction du sens et les options évaluatives. 

La phase d'ORIENTATION PRÉALABLE concerne les objectifs de la lecture. En précisant pourquoi il lit, le lecteur détermine ce qu'il cherche comme information ou réaction à la suite de sa lecture. Ainsi, pour un texte donné, deux lecteurs aux intentions de départ différentes l'interpréteront différemment, lui donneront un sens différent, selon l'intention de lecture de départ. Autre facette de cette phase d'orientation préalable, le précadrage est la mise à niveau des connaissances de base nécessaires à la compréhension d'un texte. 

Les MODES DE LECTURE désignent pour leur part les différentes attitudes, ou perspectives ou lunettes avec lesquelles on lit un texte. Ces postures vont teinter la lecture et influencer le sens que l'on donne au texte et varient selon le type de texte. Ainsi, la relation au texte sera plus participative et fera intervenir davantage le niveau affectif et les émotions (lorsqu'on lit un roman pour le plaisir). La relation sera par ailleurs plus distanciée et mener vers la critique ou l'analyse (lors d'une lecture scolaire ou universitaire). La relation au texte pourra également osciller entre les deux postures précédentes et ainsi permettre une expérience de lecture plus riche. Le journal explicatif de lecture est une activité scolaire qui permet de faire prendre conscience de la richesse d'une telle expérience participative et analytique de lecture. 

Autre processus en jeu lors de la lecture, la CONSTRUCTION DU SENS du texte, qui s'effectue à plusieurs niveaux. La compréhension locale, où on identifie les mots et leur sens. La compréhension globale, où on comprend le sens global du texte (par la reconnaissance du genre de texte et de la structure qui lui est propre, les connecteurs textuels assurant la fluidité et l'agencement des idées et les inférences). La lecture de texte littéraires laisse parfois le lecteur dans l'incertitude, ce qui l'amènera souvent à formuler des hypothèses (pour combler les incertitudes et le manque de compréhension), comme Je crois qu'il va se produire ceci, Je crois que tel personnage est l'assassin, etc. Ces hypothèses seront confirmées ou infirmées en continuant de lire le récit.

Dernier processus, l'ÉVALUATION DU TEXTE est l'étape où le lecteur apprécie le texte lu, selon qu'il est conforme ou non à ses goûts et ses valeurs, mais aussi aux valeurs de société. 

La lecture est un acte complexe, disions-nous, et il est nécessaire d'en enseigner toutes les facettes en classe de français. Cet enseignement se heurtera cependant à plusieurs obstacles, dont il faudra prendre compte pour adapter ses méthodes didactiques. Ce sera l'objet de notre prochain billet. 

Pour lire le texte complet ou pour un complément d'information : 
Simard, C. Dufays ,J.-L., Dolz, J. et Garcia-Debanc, C. (2010) La lecture. Dans Didactique du français langue première, (223-236), Bruxelle, Belgique, De Boeck.

Pour oreilles averties seulement

En période de production intensive, toute personne normalement constituée a besoin de prendre une pause pour ventiler un peu. Pour moi, il n’y a rien comme une séance d’exercice physique, ma visite au spa hebdomadaire ou une bonne séance de magasinage pour remettre le cerveau en mode disponibilité. Hier soir, je me suis prêtée à une autre de mes activités préférées : l’écoute de musique sur Youtube. Yéééééé! Vous serez cependant probablement étonnés d’apprendre le style musical qui motivait mes recherches : les vieux hits francophones des années 80, ceux qui ont bercé, et marqué à jamais, mon adolescence. 

Voici donc la nouvelle liste de lecture qui aura une place de choix dans mon IPod. Les pièces ne sont pas listées en ordre de préférence, je les aime toutes égal!!! Je vous mets cependant en garde : si vous n’êtes pas un initié, vos oreilles risquent de pleurer, ou pire, de saigner, car le synthétiseur sévissait sans pitié à cette époque! Mais à dose modérée, l'écoute peut développer une vraie dépendance... Alors qu'attendez-vous, faites-vous plaisir!


1. Larmes de métal - Soupir : le cauchemar de Normand Bratwaite 

2. Un peu plus près des étoiles - Gold

3. Désenchantée - Mylène Farmer 

4.  Stéphanie de Monaco - Comme un ouragan

5. On va s'aimer - Martine St-Clair

6. Canary Bay - Indochine

7. Nuits magiques - Catherine Lara

8. Tous les cris, les sos - Marie-Denise Pelletier

9. Voyager sans toi - Mario Pelchat (Le solo de sax...)

10. Voyage voyage - Désireless

11. Tu ne sauras jamais - Les BB (Patrick Bourgeois était trop beau dans le vidéo!)

12. Le train - Vilain Pingouin (Un classique.)
http://www.youtube.com/watch?v=GNcPTdCt4i8

13. Cover Girl - Véronique Béliveau (Je me suis fait dire tellement souvent que je lui ressemblais, avec ma petite coupe garçonne...)
http://www.youtube.com/watch?v=rnM9I-I4xcc

14. Talk About It - Belgazou (Tellement!!!)
http://www.youtube.com/watch?v=SXqc-xvHt9w


Aaaaaah! Ça fait du bien! Me voilà toute requinquée! Et vous, avez-vous des chansons réconfort?

jeudi 12 décembre 2013

Une question d'interprétation

La situation dont je vous parle s'est produite hier matin. Je suis au travail avec mes deux collègues. Il n'y a plus de patients en traitement et Dr Mon Patron rencontre une patiente privément. Nous en profitons pour jeter un oeil aux journaux qui viennent de rentrer. (Y'a pas un proverbe qui dit que quand le chat est parti les souris dansent? Ben nous, on lisait...)

Je feuillette la Tribune du 11 décembre. En page 3, un court article jouxte (bon, tout de suite les grands mots...) la publicité d'une pizzéria. Rien de plus standard dans un quotidien. C'est quand on s'intéresse à leur contenu que ça devient intéressant. Je devrais plutôt dire agaçant, et c'est un euphémisme.

L'article en question annonce que trois victimes de la tragédie du Lac-Mégantic ne pourront être identifiées. Et juste à côté, la publicité dit (je reproduis la même typographie) : « Vous BRÛLEZ d'envie de manger une VRAIE PIZZA MAISON? » Quel malheureux hasard de montage...

Nous disions, plut tôt au cours de la session, que nous recevons et interprétons les textes que nous lisons avec tout ce que nous sommes : nos connaissances antérieures et nos expériences de vie. Pour la plupart des gens, la juxtaposition dont je vous parle n'a rien de particulier. Il s'agit d'une nouvelle, terrible, certes, mais c'est là le lot des quotidiens, et d'une publicité tout ce qu'il y a de plus commune. 

Mais ici, en Estrie, il y a certains mots et certaines expressions qui ont pris un tout autre sens au cours de la dernière année. C'est que notre région a été durement éprouvée par des événements tout aussi horribles et horrifiants qu'improbables : l'explosion, le 8 novembre 2012, chez Neptune Technologies, qui a fait trois morts et de nombreux blessés; l'explosion, à peine douze heures plus tard, chez BRP de Valcourt, qui a fait un mort (mon frère Sébastien) et un blessé (Pierre Roy); et cette tragédie sans nom qui a décimé la ville de Lac-Mégantic l'été dernier. Toutes des explosions où des êtres humains, des proches, des amis, des collègues, qui ont péri dans les flammes.

Depuis un an, je ne suis plus en feu quand je suis surexcitée ou remplie d'énergie. Je ne suis certainement plus brûlée à la fin d'une grosse journée. Et je ne fonds pas de désir ni ne brûle d'envie de manger une pizza, aussi divine soit-elle.

Évidemment, ce sont mes choix lexicaux et je n'impose pas à qui que ce soit de bannir ces mots de son vocabulaire. Mais un quotidien publié à grande échelle se doit certainement de le faire, par respect envers ses lecteurs, dont nombre d'entre eux hausseront le sourcil, voire seront blessés de l'usage de mots anodins qui sont devenus, pour eux, si lourds de sens.